Quelle trajectoire pour le budget breton et gallo au Conseil régional?

Intervention sur le budget des langues de Bretagne lors de la session des 13, 14 et 15 février 2023 du Conseil régional.

« Quelle déception, moins de deux ans après notre élection, de voir que les promesses de campagne semblent déjà remisées.

Le Plan Marshall qui devait tripler le budget de la politique linguistique, se transforme en baisse pour la langue bretonne, présentée comme une hausse globale en escamotant une DM. Mais tout le monde a bien compris qu’il y a baisse, dans cette assemblée comme à l’extérieur, je vous renvoie à l’analyse du Conseil culturel de Bretagne, notamment.

L’engagement à sanctuariser le budget n’est même pas tenu. Je comprends mieux aujourd’hui pourquoi le travail de projection pluriannuelle sur le budget de la politique linguistique, travail mainte fois demandé, n’a pas été réalisé.

Le revirement paraît si fort que j’ai douté de mes propres souvenirs. Je suis donc allé consulter le site internet de campagne d’une liste aujourd’hui représentée dans la majorité. J’y vois en première page une photo de la tête de liste et de l’actuel Président du Conseil régional, avec une liste d’engagements communs, dont le « Plan Marshall des langues ».

Allons lire ce qui y est écrit en matière budgétaire : on trouve dans le fameux plan l’engagement, je cite, d’« augmenter de manière considérable le budget de la Région consacré à la politique linguistique. Dès l’année 2022, le Conseil régional de Bretagne consacrera à la politique linguistique un ratio de 7 euros par habitant, comme en Corse, soit la somme annuelle de 24 millions d’euro. Cet effort permettra de mener à bien tous les engagements souscrits devant les Bretonnes et les Bretons et notamment les bourses allouées aux futurs enseignants. » Cet engagement, ce n’était pas le mien, mais c’est celui de la majorité.

Autre engagement de la majorité, celui de « la garantie universelle de pouvoir accéder à des formations en breton ou en gallo », et là encore je cite les propos exacts tenus pendant la campagne électorale. Une garantie universelle, vaste programme, chantier difficile, je vous l’accorde ; il s’agit, si l’on prend le mot universel au sérieux, non seulement de financer les formations pour un nombre potentiellement non limité de demandeurs, de négocier avec leurs employeurs, et de garantir des maintiens de salaire. Enlevez un de ces critères et le mot universel n’a plus de sens. Je ne vois pas comment vous tiendrez ne serait-ce que la moitié de cet engagement sans progression du budget dédié.

On s’interroge en effet, à la lecture du document, car vous n’expliquez pas quels dispositifs seront réduits ou supprimés, par les effets conjugués de la coupe budgétaire et de l’inflation. Le CESER s’étonne poliment de la mention du simple maintien des financements pour l’Office public de la langue bretonne (OPLB) « alors que le Conseil régional insiste sur son rôle pour l’aménagement linguistique de la Bretagne et pour favoriser l’usage social quotidien de la langue bretonne », et liste les besoins de financements supplémentaires qui ne seront pas satisfaits.

Le Conseil culturel de Bretagne est plus clair encore : « La régression du budget 2023 risque de mettre des structures en danger et de compromettre la réalisation de projets nécessaires. Il note par ailleurs une inadéquation de ce budget avec la nouvelle Convention spécifique, qui engage la capacité d’initiative des structures associatives afin d’atteindre les objectifs fixés. »
je cite à nouveau : « La stagnation du budget ne suffira pas à la survie et au redéploiement de nos langues. Le Conseil culturel souhaite par conséquent que soit ajusté le budget 2023 consacré aux langues de Bretagne afin qu’il reste dans une dynamique de hausse nécessaire, considérant l’ensemble du budget 2022 d’une part, et l’inflation d’autre part. »

Bref, pour répondre aux engagements pris, pour mener une politique de développement et non une politique d’enterrement, il faut revoir la copie. Vous nous avez parlé d’une DM (Décision modificative) à venir sur ce programme. Mais si vous savez déjà que ce budget est insuffisant, il faut prendre les amendements qui corrigent le problème. »

Intervention sur le budget des langues de Bretagne, le 13 février 2023.

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