J’ai publié ce livre en 2018, peu de temps après mon départ de Rennes. J’y traitais du problème de la métropolisation, à partir du cas rennais (choix effectué parce qu’il s’agissait de la seule métropole, hormis Paris, dans laquelle j’avais vécu suffisamment longtemps pour avoir un avis argumenté sur ses dynamiques territoriales). L’originalité du livre est qu’il ne traite pas des inconvénients de la métropolisation pour les territoires présentés comme les victimes des déséquilibres territoriaux: les zones rurales ou les petites villes qui perdent des activités, des services, éventuellement de la population. Ce thème avait déjà été largement traité et je n’avais pas grand-chose à y ajouter.

Mon but était en fait de traiter des inconvénients de la métropolisation pour les Rennais eux-mêmes, et plus largement pour les habitants de l’aire urbaine de Rennes. Toute la première partie est donc consacrée aux conséquences négatives de la concentration d’activités et de population, pour le logement, la mobilité, le patrimoine, l’environnement, la santé, etc. A l’époque, la concurrence territoriale était assumée par une majorité d’élus du Pays de Rennes, qui souhaitaient (ils l’ont écrit dans le Schéma de cohérence territoriale) la croissance la plus forte possible, y compris si cela devait se faire au détriment d’autres territoires. J’essayais donc d’expliquer qu’il s’agissait aussi d’un mauvais choix pour les habitants de la métropole.
Dans la deuxième partie, j’élargissais le propos en développant un argumentaire qu’on pourrait résumer ainsi: la course à la taille (en population notamment) n’amène pas forcément les bénéfices économiques attendus, et engendre des inconvénients trop souvent sous-estimés. J’y parlais aussi des inconvénients d’un développement en « îlots » des métropoles, c’est à dire des métropoles conçues comme un réseau de territoires à la pointe du progrès, et coupées de leur environnement régional.
Depuis, la situation a déjà évolué. Le discours sur la supériorité des métropoles a peu à peu été remplacé par un discours sur la complémentarité des territoires. Cela peut faire sourire, mais en politique, les mots comptent énormément. Ils façonnent des représentations, des cadres de pensée et d’action. Lors des municipales de 2020, dans presque toutes les grandes métropoles de France, des listes (souvent écologistes) ont défendu un modèle de développement plus solidaire et critiqué la course à l’attractivité. D’une manière que j’ai pour l’instant plus de mal à mesurer, il semble que les pratiques des élus de ces territoires évoluent aussi, avec forcément un temps de décalage par rapport aux discours. Nantes en particulier semble avoir pris conscience, avec un temps d’avance, de la nécessité d’une politique d’équilibre, qui pour diverses raisons ne peut fonctionner qu’avec le concours des métropoles elles-mêmes. A suivre.
Rennes saturée? Une croissance à partager. Nil Caouissin, Presses populaires de Bretagne, 2018. 12 euros.
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